La Mère
de Florian Zeller
Mise en scène de Marcial Di Fonzo Bo
Avec Catherine Hiegel, Clément Sibony, Jean-Yves Chatelais, Olivia Bonamy
La Mère de Florian Zeller est une pièce de théâtre qui, sans négliger le divertissement, laisse un place importante à l'introspection, au regard sur soi, au rapport aux autres, à l'amour et ses limites tout en contribuant à transformer la conception du drame.
Florian Zeller est un grand auteur tout simplement ! C’est ce que s’exclame au sortir du théâtre de Paris celui qui vient voir La Mère, cet étranger qui ne sait rien de lui, qui vient de sortir d’un séminaire, un vrai pour le coup, pas celui dont il est question dans la pièce. Il s’installe ici confortablement. Il a acheté l’Officiel des spectacles ou le Pariscope. ll a une pensée pour sa propre mère qu’il vient d’avoir il y a peu au téléphone. Il pense à August Strindberg et à sa pièce Père et cesse d’imaginer, pour vivre cette mise en scène, et s’en laisse imprégner.Les scènes se déroulent comme autant de tableaux en premier et en arrière plan, en variations du même espace, peuplées de non-dits, de silences. Il pense : rêve-t-elle ? Est-elle dans le réel ? Nous ne savons plus au fond ce que représente la parole, ni ce que signifie le silence. Pourtant, nous sentons aussi que nous avons besoin du silence. La parole et le silence sont étroitement liés. N’est-ce pas parce qu’à sa manière, le silence signifie à travers les mots autant que les mots signifient eux-mêmes ?Cette femme, cette mère, excelle dans l’art du silence. Il est vrai, elle parle, elle crie, elle pleure, mais son silence à elle se traduit dans la forme la plus difficile, à savoir l’incapacité de pouvoir communiquer. On le voit bien, elle parle à son mari en faisant les demandes et les réponses, à son fils aussi, à elle-même.La Mère est une uvre référenciellement prolifique, qui renvoie le spectateur à Harold Pinter, revoyant ses personnages dans des pièces closes, livrés les uns aux autres, sans oublier Jon fosse observant le public dans l'émotion confuse nous redire : "Si une pièce est réussie, les gens qui la regardent, ou au moins quelques uns, devraient à la fois rire et pleurer". Et il se dit en pensant aussi à Maurice Maeterlink, que le jeu stylisé de cette mère, de son mari ou de son fils suggère les attitudes de l’âme face au destin, l’éveil lent à la fatalité, celle du théâtre de Tchékhov aussi. Florian Zeller est de ce cru là, de ces auteurs ayant fait évoluer le théâtre pour en faire un spectacle de l’âme et il voit juste car la dimension métaphysique est omniprésente.Sa comédienne en titre n’a pas eu de chance ! Comme diraient deux ou trois commères du dimanche assises sur des fauteuils derrière. C’est une femme heurtée et bousculée qu’il fallait pour jouer ce rôle. Tout le monde sait que Catherine Hiegel est une immense actrice encore "éraflée" d'un événement récent : "Elle s’est fait vider de la Comédie française" après trente années où elle fut sociétaire de cette institution. Elle a du caractère, elle ne mâche pas ses mots, elle est partie en payant un pot à tout le monde car elle n’est pas du genre à partir "en faisant la gueule".C’est une comédienne comme ça qu’il fallait pour La Mère de Florian Zeller et elle parle de son rôle avec véracité, avec la verve qu’on lui connait tous et qui ne manque pas de nous émouvoir et pour certains de nous, mettre les larmes aux yeux. Cette mère là, elle est belle même si ses enfants ont quitté la maison et qu’elle a créé le vide autour d’elle. Elle conspue sa fille, affiche et clame haut et fort l’injuste préférence qu’elle porte à son fils en l’étouffant de cajolerie, en paroles comme en actes. Elle transgresse les tabous avec flamboyance. Elle hurle, elle agace et finit par bouleverser.La scénographie de cette pièce a quelque-chose du caméléon variant sur elle-même comme sait le faire Yasmina Reza qu’on voudrait entendre nous dire ici, à point nommé à propos du caractère identitaire de l’uvre de Florian Zeller : "Le réel, au fond, n'existe qu'en soi. Il est foisonnant mais il foisonne pour rien si vous n'allez pas vous frotter à lui de la manière la plus violente ou la plus amoureuse, ce qui revient au même".Chacun des protagonistes trouve ici sa place dans la complémentarité si ce n’est en symbiose. Jean-Yves Chatelais, le mari et le père, affiche sa drôlerie malgré la gravité de la situation et Olivia Bonamy tiraillée par l’amour de Clément Sibony et la jalousie de sa belle mère, ne perd pas son élégance native.Avec Marcial Di Fonzo Bo, un metteur en scène au regard aiguisé, La Mère instaure le trouble et rend lucide une psychologie rare. Tout est dans le silence, le regard, le rien comme chez Marguerite Duras. Le fonctionnement intérieur de l’auteur après L'Autre et Elle t’attend place son chef-d’uvre de clairvoyance dans l’altruisme et ses secrets.
Yves-Alexandre Julien
29/11/2010
PARIS
Lucernaire
Mise en scène de GÉrard Rauber
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