Le Suicidé
de Nicolaï Erdman, André Markowicz
Mise en scène de Patrick Pineau
Avec Anne Alvaro, Nicolas Bonnefoy, Louis Beyler, Hervé Briaux, David Bursztein, Laurence Cordier, Jérôme Derre, Nicolas Daussy, Catalina Carrio Fernandez, Florent Fouquet, Nicolas Gerbaud, Aline Le Berre, Manuel Le Lièvre, Renaud Léon, Laurent Manzoni, Babacar M’Baye Fall, Charlotte Merlin, Sylvie Orcier, Eliott Pineau Orcier
Le Suicidé, une pièce de théâtre qui ouvre les guillemets sur une question existentielle : "Est-ce que la vie est belle ?", aussitôt refermés sur une affirmation "Etre mort, c'est être reconnu et respecté".
Nicolaï Erdman a écrit cette pièce en 1928. Censurée par Staline en 1932, elle verra le jour en URSS en 1982, une date qui coïncide avec la fin de sa carrière d'auteur. Homme de lettres et d'engagement, son uvre à géométrie variable n'était pas pour plaire à la dictature en place. Contraint à un exil forcé, il obtint le droit de revenir sur ses terres en 1949. De pièces dramatiques, il n'y eut plus et dès lors, il se consacra à l'écriture pour le cirque, fit des adaptations pour le théâtre et le cinéma. Cette pièce dénonce avec force un homme pris dans l'étau de sa conscience contre-serrée à celle des représentants de l'intelligentsia. Lesquels le poussent à commettre l'irréparable au nom du peuple et de la nation.La pièce commence par la découverte de trois cubes disproportionnés s'ouvrant sur des modestes intérieurs. Ici la chambre de Sémione Sémionovitch, interprété par Patrick Pineau, et son épouse Maria Loukianovna, dans le rôle Sylvie Orcier. Ici le salon d'Alexandre Pétrovitch Kalabouchkine, joué par Laurent Manzoni. Des néons librement répartis autour du plateau réinventent le clair-obscur de la lune.Au milieu de la nuit, un homme réveille brutalement sa femme à cause d'une envie de saucisson. Une scène de ménage s'impose et la violence des propos délogent des songes la belle-mère Sérafina Ilinitchna, Anne Alvaro. Les portes claquent, comédie à la Feydeau ou marivaudage à la steppe. C'est bruyant et bien à-propos.Le mari va proférer une petite phrase cinglante à sa femme : "Est-ce que c'est une vie ça" ? Une incision dans l'esprit de cet homme qui va s'avérer être la clé de voute de la pièce du début à la fin. Patrick Pineau entraine le public dans une mise en scène révélant le côté pervers des hommes.L'enchainement des situations accélérées par une galerie de personnages, tant épiques que pitoyables, amènent à réfléchir sur les minimas consensuels entrainant des séquelles irréversibles sur des individus, dits faibles au moment des faits.Sémione Sémionovitch se considère en infériorité individuelle pour la simple raison qu'il pense ne servir à rien chez lui. Sans emploi, c'est sa femme qui assure les maigres rétributions du foyer. Est-il indispensable de rappeler qu'une décennie après la révolution d'Octobre, la Russie oscillait vers le néant et rapporté à l'échelle sociale, le peuple survivait.Donc, Sémione a décidé d'en finir avec la vie. Sa femme, sa belle-mère, le voisin le surveillent tant bien que mal. Un destin qui tient à un coup de roulette russe. La rumeur ayant couru qu'un homme voulait se suicider, s'ensuivent chez lui des visites de personnalités aussi intrigantes que dérangeantes. A croire qu'elles se sont concertées avant pour se donner le mot car toutes le convainquent de prendre la bonne résolution au nom de l'intérêt public et national. Sémione se convertit un temps à ce délit d'opinion et se pose en héros. Le jour et l'heure de la mort ont été décidés en commun. Une fête s'organise pour le jour J.La scène du déjeuner champêtre est magnifique, musiciens et chanteurs lèvent la corde et la voix dans cette journée peu ordinaire. Les bouteilles de vin se débouchonnent allégrement. Ambiance festive jusqu'au moment où le carillon sonne l'heure du verdict. Silence. Une remarque pour quelques longueurs relevées entre certains passages.Les visages des comédiens se parent de tristesse et d'effacement à cet instant précis. C'est ici que la mise en scène s'élève dans des sphères qui dépassent la fiction théâtrale. Pris dans un tourbillon de folie, les hommes et les femmes qui ont égoïstement poussés Sémionne à s'effacer du souffle de la vie sont atteints par le revers de situation.Patrick Pineau n'est pas tombé dans le pathos scéniquement contextuel. Nous entendons le bruit discret de la plume de Nicolaï Erdman griffonnés les mots sur le manuscrit. L'inspiration du texte, lequel a abouti à un spectacle de grande tenue grâce à une mise en scène mêlant histoire et fiction, réalité et imaginaire, coquetterie et illusion.Cette pièce sans le rythme insufflé par l'ensemble des comédiens n'aurait pas eu la conjonction saveur-intérêt. En Russie, le froid fait marcher vite, la vie est une musique empruntée à la jovialité tzigane, une poésie dont les rimes s'accordent selon le métronome du temps. Les gens y sont vrais, sincères et généreux.Cette ambiance se respire à poumons ouverts avec les magnifiques prestations de Patrick Pineau et d'Anne Alvaro. La profondeur des personnages est à la hauteur de l'expression de leur talent de comédiens de théâtre. Que dire de Sylvie Orcier dont le rôle est à double-fond, une femme qui tente de sauver son mari et une femme prise dans l'ombre de sa mère. Une belle composition pour cette comédienne qui étonne toujours agréablement.Au regard de l'intensité de la pièce, une mention particulière adressée à l'ensemble des comédiens.Le Suicidé ne serait pas Le Suicidé sans la collaboration artistique ciselée comme une dentelle russe de la part des techniciens. Le public ne s'est pas trompé, les applaudissements ont été très largement nourris et appuyés. Longue vie au Suicidé.
Philippe Delhumeau
29/01/2012
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