Tendre et Cruel
de Martin Crimp
Mise en scène de Brigitte Jacques-Wajeman
Avec Anne Le Guernec, Pierre-Stéfan Montagnier, Thibault Perrenoud, Bertrand Suarez-Pazos, Pascal Bekkar, Sophie Daull, Sarah Le Picard, Aurore Paris, Jenny Mutela, Arnold Mensah
Une tragédie contemporaine inspirée d’un texte antique de Sophocle, Les Trachiniennes.
Il n’est pas de tragédie sans histoire douloureuse, d’amour sans haine, de guerre sans salissures. Ainsi vont les textes des tragédiens de la Grèce antique. L’alphabet hellénique s’inscrit dans la nuit des temps par la transmission de ces histoires séculaires. Elles perdurent dans la transposition d’adaptations corrélant avec des mises en scène épurées de classicisme et débordant de contemporanéité.La colère d’Achille, épopée de L’Iliade d'Homère, Antigone de Sophocle, Les Perses d’Eschyle sont les exemples des textes anciens fondateurs de l’harmonie universelle communément appelée Théâtre. Inspiré par les personnages de la guerre de Troie, Shakespeare produisit Troilus et Cressida. Pièce confrontant dans un combat mémorable Grecs et Troyens et en parallèle, la révélation d’un amour confus entre Troilus et Cressida. Plus proche des auteurs contemporains, Jean Giraudoux s’investit dans l’écriture d'une pièce maintes fois reprise La Guerre de Troie n’aura pas lieu. Visionnaire émérite de son époque, il compara la situation de l'Europe des années trente avec le conflit sous-jacent et l’Antiquité avec la guerre de Troie.L’histoire se répète d’une autre façon avec Martin Crimp, lequel reprend en profondeur Les Trachéniennes de Sophocle. Tragédie conceptualisée au mode présent, elle marque l’actualité des bains de sang qui sévissent en Afrique. Tendre et Cruel s’inscrit en marge des pièces du dramaturge anglais, un exutoire à une influence post-dramatique. Lesdites pièces étalent, sans voyeurisme, une déferlante de violence sociétale contemporaine. Si le style se veut prompt à un engagement sans concession, l’humour donne rendez-vous à des répliques fragmentées de tendresse et de soumission. Avec cette création, l’écriture de Martin Crimp arrive à maturité. Il élargit son histoire au-delà des limites imposées par l’horizontalité des nouvelles véhémences rapportées par les médias.Il ajuste sa plume, telle une baïonnette aiguisée, pour transpercer la superficialité du monde bouleversé par les agissements infligées par des hommes à leurs semblables et inconsciemment à eux-mêmes.Les laissez-pour-compte se meurent en silence dans l’unique but de ressurgir des épreuves traversées. Leur volonté, s’élever à la face du monde, soulever le mythe de Sisyphe des interrogations existentielles et manifester un redoublement de vivre.Tendre et Cruel est une pièce lucide qui explore un ensemble de sous-ensembles composés d’une femme, son fils, les suivantes, le mari et les faux-amis. Pitch. Amélia, une belle femme élégante, soucieuse de son apparence, séjourne avec son fils dans une luxueuse maison désignée comme résidence de consignation à côté de l’aéroport. Le personnel mis à sa disposition lui convient. Son fils se cloître dans un mutisme exagéré dû à la révolte de son âge et feint un désuvrement mental et physique. Son général de mari, envoyé en Afrique pour lutter à armes inégales contre le terrorisme, envoie deux orphelins à son épouse. La surprise passée, Amélia découvre la belle et fragile jeune fille et son frère avec des comportements pour le moins étrange.La perversité du général coule en ses veines comme l’indifférence luit dans les yeux des tueurs. La jeune fille n’est autre que la maîtresse du mari et Amélia l’apprendra à ses dépends.La structure de la mise en scène de Brigitte Jacques-Wajeman est catapultée par deux ressorts tendus à l’extrême, l’intensité du texte et l’importance placée sous le signe de la scénographie. La fluidité des rapports entre Amélia et le personnel lui permettent d’oublier temporairement sa consignation. Prise d’excès, elle s’étouffe en un personnage qui ne lui ressemble plus. Son quotidien alterne entre impatience et démesure, amour et amitié, confiance et lucidité.Les codes du langage mettent en scène des répliques effleurant les sentiments et l’incompréhension car l’attente crée des doutes. La fatalité s’installe progressivement dans l’esprit d’Amélia et elle joue avec cette douleur comme les deux esthéticiennes s’amusent de la situation. La tension monte en puissance, le temps filtre les oppositions et les contrariétés. Les comédiens s’investissent dans des personnages aussi spontanés qu'énigmatiques, pris individuellement.Le décor s’adapte à la violence du monde traduit par la dramaturgie obliquant sur deux terrains diamétralement opposés, une chambre à coucher et un plateau épuré.Le fil de l’histoire se renverse au retour du général. Défiguré, le militaire tortionnaire devient victime de ses agissements passés. Il est des plaies béantes qui ne se referment jamais à cause de l’horreur des massacres organisés. La mémoire collective manifestée par la présence des deux orphelins serrent comme un garrot la conscience entachée du général.La mise en scène analyse l’envers et l’endroit du texte de Martin Crimp et d’avouer que les reporters de guerre vivant en direct les conflits ethniques en Afrique n’en disent pas autant que les comédiens investis en des personnages tendres et cruels.Brigitte Jacques-Wajeman a réinventé le texte de Martin Crimp sans en modifier ni le fond, ni la forme. Mais, il y a cette dynamique activée telle une mécanique qui résonne de la fluidité des engrenages huilés d'amour, de guerre et de trahison.
Philippe Delhumeau
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