Strip-tyque
de Denys Treffet
Mise en scène de Anne De Broca, Muriel Piquart
Avec Anne De Broca, Erwan Daouphars, Pablo Nemirovsky (bandonéon)
Le sexe retrouve ses lettres de noblesse.
La sexualité est une notion complexe, diverse et propre à chacun. Certains sont à l’aise avec leur sexualité, d’autres complètement fermés, voire bouleversés par le coït et tout ce qui l’entoure. Mais peu importe la vision de chacun, le sexe est un sujet qui nous touche tous. Il est universel, naturel et vital.
Nous vivons dans une époque bien hypocrite où l’on diabolise l’acte sexuel quel qu’il soit, on en fait un tabou, alors qu’il n’a jamais autant été utilisé. Transformé, détourné et servi à toutes les sauces, le sexe fait vendre. Arrêtons cette fausse pudibonderie et la perversion de cet acte essentiel et jouissif, pour en parler franchement, sans détour et avec poésie. Les Grecs ont représenté la sexualité en la peignant sur des amphores, ou en la sculptant, les Indiens en ont fait un art de vivre, les auteurs français du XVIIIe siècle ont ouvert la voie de la littérature érotique. Même bien avant cette époque, on trouve de nombreuses chansons paillardes aux accents grivois un peu partout dans le monde. Le sexe fait partie de l’humain et de son histoire.
Aujourd’hui, c’est Denys Treffet qui nous en parle sans tabou. Un auteur qui aime utiliser le mot juste. Dans Strip-tyque, résonnent les verges, couilles, sperme et foutre. On appelle un chat un chat. Rien de choquant ou de déplacé, juste remettre les idées à leur juste place. Ce spectacle est présenté comme une pièce érotique, elle serait plutôt une pièce humaniste, où les choses sont dites et décrites dans leur simple vérité. Un auteur avec une belle plume qui nous embarque dans sa poésie et l’on se délecte des mots et des jeux ou émois qu’ils provoquent.
La langue parle, le corps aussi. Pour incarner ce texte, deux comédiens, Anne De Broca et Erwan Daouphars. Des costumes simples, un manteau rouge vif pour Madame, couleur de passion et de sang ; un costume élégant pour Monsieur. Ils nous livrent leurs secrets, leurs pensées, leurs découvertes en toute intimité et avec franchise. Ils sont vrais, vivants et s’amusent de leur parole, tout en étant dans une sincérité naturelle.
L’histoire se déroule en trois temps. La femme apparaît sur scène, les yeux bandés, elle nous dévoile ses activités sexuelles, toute la panoplie. Et l’humain est créatif dans sa sexualité, de bondage à gang bang, en passant par le sadomasochiste, le fétichiste, les orgies et autres sévices corporels... Cette prostituée nous évoque des images crues, parfois violentes même. Elle joue avec les hommes qui jouent et jouissent d’elle. Et pourtant, parfois soumise dans les pratiques, elle n’est en rien une victime. Bien au contraire, elle est la maîtresse, celle qui dirige, celle qui érige. Elle teste, découvre, accorde, repousse ses limites, se prostitue, se fait violence. Oui, mais c’est elle qui décide, elle garde le contrôle et le pouvoir. On explose ici une idée archaïque qui veut que la femme soit soumise à l’homme et ce doublement dans l’acte sexuel. C’est faux ! La femme choisit sa sexualité et devient prêtresse des désirs masculins.
En réponse à cette première partie, intervient l’homme. Masqué d’un loup blanc, il se dévoile pour nous faire part de sa frustration. Son pénis le dirige, il en est le prolongement. Comme si l’homme n’existait que pour satisfaire cette petite part de son être, et qu’il disparaît dès que celui-ci s’éveille. Une vision juste, belle et sensible de la sexualité masculine, en opposition totale avec ce que la société tente d’imposer dans l’esprit collectif. L’homme n’est pas le mâle tout puissant qui s’impose par son sexe, bien au contraire, il est son esclave. Et quelle différence dans sa vision du vagin et du clitoris, temple suprême à la princesse gardienne et complice. Une description si poétique et pleine d’images subtiles d’un homme donnant du plaisir à sa partenaire avec son doigt, avec sa pulpe, avec sa langue, avec amour et passion.
Un homme, une femme, une rencontre. La dernière partie évoque la fusion des deux êtres, des deux corps. Aucun sexe n’est supérieur à l’autre, ils sont complémentaires et se retrouvent, s’accomplissent enfin dans le coït et la jouissance. Leur connexion ouvre les portes de l’univers.
Une mise en scène et un plateau épurés. Pas besoin de lit, de canapé ou de peaux de bêtes pour parler de la sexualité, non. Une table, trois chaises, un tabouret de bar, c'est bien suffisant. On pourrait être en fin de soirée chez des amis, ou encore au café du coin à une heure tardive, une fois le rideau de fer baissé, lorsque les habitués se retrouvent entre eux pour parler de la vie et refaire le monde en finissant la dernière bouteille de vin. Car oui, le vin est présent, il délie les langues et est un subtil clin d’œil à Dionysos, dieu des dieux qui avaient bien compris les plaisirs de la vie terrestre. Nul besoin non plus de mimer l’acte sexuel, les mots sont bien assez marquants pour ne pas tomber dans cette vulgarité grossière. La femme parle, marche, se pose ; l’homme parle à son tour, fait quelques pas, se rassoie... Ils dansent ensemble. Littéralement parlant, quelques pas de tango pour un duo amoureux.
Et pour envelopper ce texte, les mots poétiques sont accompagnés de musique. Des airs doux et vibrants qui nous emmènent dans leur voyage, embarquant le texte, les comédiens et le public. Le musicien Pablo Nemirovsky est un complice discret. Indivisible de son bandonéon (sorte d’accordéon plus délicat et aux sonorités plus raffinées), il est constamment sur scène, observant, écoutant, accompagnant et suggérant l’émoi aussi. L’homme et la femme se confient à lui, trinquent avec lui, se laissent enivrer par sa musique. Son bandonéon devient le souffle des passions. Anne De Broca, merveilleuse comédienne et chanteuse, interprète plusieurs chansons aux sonorités hispaniques. Une langue et des accents qui se prêtent à l’amour, emplis de passion, de feu, de désir, et en même temps de tristesse et de mélancolie.
Strip-tyque est une création atypique et magnifique. Tout y est poésie, le sujet dans son art et sa manière d’être abordé, sa mise en scène, son interprétation, sa musique, sa justesse. Bien loin des caricatures ou des faux semblants de sexualité que cherche à imposer une époque troublée et déconnectée d’elle-même et de l’autre, Denys Treffet et son équipe nous rappellent que la sexualité, quelle qu’elle soit, est naturelle, humaine, essentielle et délicieuse.
Nous vivons dans une époque bien hypocrite où l’on diabolise l’acte sexuel quel qu’il soit, on en fait un tabou, alors qu’il n’a jamais autant été utilisé. Transformé, détourné et servi à toutes les sauces, le sexe fait vendre. Arrêtons cette fausse pudibonderie et la perversion de cet acte essentiel et jouissif, pour en parler franchement, sans détour et avec poésie. Les Grecs ont représenté la sexualité en la peignant sur des amphores, ou en la sculptant, les Indiens en ont fait un art de vivre, les auteurs français du XVIIIe siècle ont ouvert la voie de la littérature érotique. Même bien avant cette époque, on trouve de nombreuses chansons paillardes aux accents grivois un peu partout dans le monde. Le sexe fait partie de l’humain et de son histoire.
Aujourd’hui, c’est Denys Treffet qui nous en parle sans tabou. Un auteur qui aime utiliser le mot juste. Dans Strip-tyque, résonnent les verges, couilles, sperme et foutre. On appelle un chat un chat. Rien de choquant ou de déplacé, juste remettre les idées à leur juste place. Ce spectacle est présenté comme une pièce érotique, elle serait plutôt une pièce humaniste, où les choses sont dites et décrites dans leur simple vérité. Un auteur avec une belle plume qui nous embarque dans sa poésie et l’on se délecte des mots et des jeux ou émois qu’ils provoquent.
La langue parle, le corps aussi. Pour incarner ce texte, deux comédiens, Anne De Broca et Erwan Daouphars. Des costumes simples, un manteau rouge vif pour Madame, couleur de passion et de sang ; un costume élégant pour Monsieur. Ils nous livrent leurs secrets, leurs pensées, leurs découvertes en toute intimité et avec franchise. Ils sont vrais, vivants et s’amusent de leur parole, tout en étant dans une sincérité naturelle.
L’histoire se déroule en trois temps. La femme apparaît sur scène, les yeux bandés, elle nous dévoile ses activités sexuelles, toute la panoplie. Et l’humain est créatif dans sa sexualité, de bondage à gang bang, en passant par le sadomasochiste, le fétichiste, les orgies et autres sévices corporels... Cette prostituée nous évoque des images crues, parfois violentes même. Elle joue avec les hommes qui jouent et jouissent d’elle. Et pourtant, parfois soumise dans les pratiques, elle n’est en rien une victime. Bien au contraire, elle est la maîtresse, celle qui dirige, celle qui érige. Elle teste, découvre, accorde, repousse ses limites, se prostitue, se fait violence. Oui, mais c’est elle qui décide, elle garde le contrôle et le pouvoir. On explose ici une idée archaïque qui veut que la femme soit soumise à l’homme et ce doublement dans l’acte sexuel. C’est faux ! La femme choisit sa sexualité et devient prêtresse des désirs masculins.
En réponse à cette première partie, intervient l’homme. Masqué d’un loup blanc, il se dévoile pour nous faire part de sa frustration. Son pénis le dirige, il en est le prolongement. Comme si l’homme n’existait que pour satisfaire cette petite part de son être, et qu’il disparaît dès que celui-ci s’éveille. Une vision juste, belle et sensible de la sexualité masculine, en opposition totale avec ce que la société tente d’imposer dans l’esprit collectif. L’homme n’est pas le mâle tout puissant qui s’impose par son sexe, bien au contraire, il est son esclave. Et quelle différence dans sa vision du vagin et du clitoris, temple suprême à la princesse gardienne et complice. Une description si poétique et pleine d’images subtiles d’un homme donnant du plaisir à sa partenaire avec son doigt, avec sa pulpe, avec sa langue, avec amour et passion.
Un homme, une femme, une rencontre. La dernière partie évoque la fusion des deux êtres, des deux corps. Aucun sexe n’est supérieur à l’autre, ils sont complémentaires et se retrouvent, s’accomplissent enfin dans le coït et la jouissance. Leur connexion ouvre les portes de l’univers.
Une mise en scène et un plateau épurés. Pas besoin de lit, de canapé ou de peaux de bêtes pour parler de la sexualité, non. Une table, trois chaises, un tabouret de bar, c'est bien suffisant. On pourrait être en fin de soirée chez des amis, ou encore au café du coin à une heure tardive, une fois le rideau de fer baissé, lorsque les habitués se retrouvent entre eux pour parler de la vie et refaire le monde en finissant la dernière bouteille de vin. Car oui, le vin est présent, il délie les langues et est un subtil clin d’œil à Dionysos, dieu des dieux qui avaient bien compris les plaisirs de la vie terrestre. Nul besoin non plus de mimer l’acte sexuel, les mots sont bien assez marquants pour ne pas tomber dans cette vulgarité grossière. La femme parle, marche, se pose ; l’homme parle à son tour, fait quelques pas, se rassoie... Ils dansent ensemble. Littéralement parlant, quelques pas de tango pour un duo amoureux.
Et pour envelopper ce texte, les mots poétiques sont accompagnés de musique. Des airs doux et vibrants qui nous emmènent dans leur voyage, embarquant le texte, les comédiens et le public. Le musicien Pablo Nemirovsky est un complice discret. Indivisible de son bandonéon (sorte d’accordéon plus délicat et aux sonorités plus raffinées), il est constamment sur scène, observant, écoutant, accompagnant et suggérant l’émoi aussi. L’homme et la femme se confient à lui, trinquent avec lui, se laissent enivrer par sa musique. Son bandonéon devient le souffle des passions. Anne De Broca, merveilleuse comédienne et chanteuse, interprète plusieurs chansons aux sonorités hispaniques. Une langue et des accents qui se prêtent à l’amour, emplis de passion, de feu, de désir, et en même temps de tristesse et de mélancolie.
Strip-tyque est une création atypique et magnifique. Tout y est poésie, le sujet dans son art et sa manière d’être abordé, sa mise en scène, son interprétation, sa musique, sa justesse. Bien loin des caricatures ou des faux semblants de sexualité que cherche à imposer une époque troublée et déconnectée d’elle-même et de l’autre, Denys Treffet et son équipe nous rappellent que la sexualité, quelle qu’elle soit, est naturelle, humaine, essentielle et délicieuse.
Cyriel Tardivel
19/03/2015
PARIS
Lucernaire
Mise en scène de GÉrard Rauber
Ce spectacle musical, orchestré par le génial metteur en scène Gérard Rauber, réunit un quatuor de talents exceptionnels pour nous emporter dans un voyage époustouflant à travers l’univers de Jean-Sébastien Bach ou en rapport à son œuvre comme cet étonnant et pétillant « 12345 »...
L'avis de Yves-Alexandre Julien
Lucernaire
PARIS
"Come Bach" : Un quatuor virtuose qui réinvente les classiques
de Gérard RauberMise en scène de GÉrard Rauber
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AVIGNON
Pierre de Lune
la méthode Sherlock
de Paul Spera,andrea Redavid
Mise en scène de Andrea Redavid,paul Spera
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